3 Jul 2015
Le travail dans les crises
Débat 1
Ne s’agit-il pas ici d’une tautologie ? La crise actuelle est-elle autre chose qu’une crise du travail ? Ce qui parait évident aujourd’hui c’est que l’on a largement surpondéré la dimension financière de la crise actuelle. S’il s’agissait d’une bulle financière comme en 2000, elle aurait éclaté et nous aurions retrouvé le chemin d’une croissance rapide. La crise que nous vivons peut plus logiquement être assimilée à une crise de la quantité de travail. Des pays développés en voie de désindustrialisation. Des secteurs entiers en voie de paupérisation. Des régions entières en voie de désertification. Des générations entières en voie d’échec face à l’emploi. Mais la crise actuelle est aussi une crise de la qualité du travail. Des déqualifications massives. Des dysfonctionnements majeurs en matière d’organisation du travail. Un phénomène de plus en plus répandu du mal être au travail. Une précarité qui gagne du terrain chaque jour.
Par bonheur, toute crise est génératrice d’une croissance nouvelle. Le mot « crise » lui-même vient du grec « crisis » qui signifie « crible », « tamis », au filtre duquel il y a autant – ou plus – de « bons grains » qui passent que de « mauvais » qui sont éliminés.
La crise est ainsi aussi une promesse. Quantitativement, jamais autant de nouveaux métiers n’ont appelé autant de nouvelles formations. Jamais autant de pays dits jadis «sous développés » n’ont aussi vite émergé avec des dizaines de millions d’emplois à la clé. Jamais les nouvelles technologies n’ont été aussi créatrices d’emplois. Qualitativement, jamais les passerelles n’ont été aussi nombreuses entre qualifications comparables. Jamais les possibilités de promotions professionnelles n’ont été aussi multiples. Jamais les nouvelles technologies n’ont offert autant de possibilités d’emploi adaptées aux contraintes du monde « moderne ».
Ne cédons pas pour autant à l’irénisme. Au moins quatre débats restent à instruire : celui du prix du travail ; celui de la précarité ; celui des politiques de l’emploi et celui du bien être au travail. Un crible ou un tamis ne remplit sa fonction que si ses grilles sont calibrées et ordonnées.
Contributions
Olivier Pastré – Travail et crise, le mythe de Sysiphe