Sobriété et bien-être : les inconciliables ?

Écrit pour la controverse 5 – Sobriété et bien-être : les inconciliables ?

Les crises climatique et énergétique ont vivifié les réflexions sur la sobriété et l’abstinence qui ont passionné les philosophes et les théologiens depuis trois mille ans. Mais la population mondiale atteignait 200 millions d’habitants au Ve siècle avant notre ère contre 8 milliards aujourd’hui et 10 milliards dans quatre décennies. La consommation d’énergie carbonée a fortement augmenté à partir du XVIIIe siècle. Il est donc tentant de vouloir revenir en arrière, avant le monde industriel. C’est oublier qu’au cours des dix-huit premiers siècles de notre ère, le niveau de vie a essentiellement stagné tandis que l’espérance de vie oscillait entre 18 et 23 ans selon les bonnes ou mauvaises récoltes et la présence ou absence de guerre. Les deux siècles de révolution industrielle ont multiplié par 20 le niveau de vie et par 3 l’espérance de vie. Réenrouler le film pourrait avoir des conséquences imprévues et désagréables.

Il s’agit donc de construire une nouvelle sobriété qui ne nous fait pas perdre le bénéfice du triplement de l’espérance de vie, pour l’essentiel en bonne santé. Ce qui suppose de maintenir un niveau de vie élevé et néanmoins sobre. Il est donc important d’accélérer la transition vers un habitat collectif décarboné et densifié sur des transports publics décarbonés, de robotiser, numériser et électrifier l’ensemble du système productif, de rénover tous les bâtiments publics, et d’avancer rapidement vers une énergie décarbonée (nucléaire, hydroélectrique, photovoltaïque, éolien, biomasse, etc.).

De nombreuses questions apparaissent :

1. Les sociétés développées et émergentes -SDE – (80% de la population mondiale et 90% du PIB en 2030) sont-elles préparées à ces évolutions ? Vont-elles les rendre possibles ou tenter de les bloquer ?
2. Les technologies propres vont-elles progresser suffisamment vite vers l’électrification complète de nos systèmes de production et de transport et favoriser un habitat intégrant les nouvelles contraintes bioclimatiques, dans l’ensemble des SDE ?
3. Comment mettre en œuvre une transformation systémique des modes de logement et de transport dans les SDE ?