Le protectionnisme protège-t-il?

Les thématiques protectionnistes reviennent en force dans le discours politique, même si la transposition dans les politiques économiques reste assez limitée. Renoncer à signer des accords régionaux (l’Accord Trans Pacifique), ou encore geler la négociation de ceux-ci (l’accord Transatlantique) n’a pour l’instant pas de rapport avec la contagion des droits de douane observée pendant la Grande Dépression des années trente.

Mais le risque existe que l’accord de libre-échange Nord-Américain (ALENA) soit dénoncé par l’Administration américaine, tandis qu’un conflit commercial entre les Etats-Unis et la Chine n’est pas exclu. On sortirait alors de la situation connue depuis la crise de 2008 de protectionnisme larvé, où une myriade de micro-mesures ayant un impact globalement limité restent encadrées par les pare-feu de l’OMC.

L’argumentaire sous-jacent, repris en France dans certains programmes politiques pour la Présidentielle, est de protéger les perdants de la mondialisation.

Toutefois, la protection par les droits de douane, ne protège plus. Les chaînes de valeur sont devenues globales et fermer ses frontières aux produits étrangers c’est aussi les fermer aux nombreux composants nationaux (préalablement exportés) qu’ils contiennent. De surcroît les droits de douanes sont régressifs sur le plan de la redistribution des revenus : ils pénalisent les ménages dont la propension à consommer est la plus importante, et qui consomment plus de biens que de services, soit les familles modestes avec enfants.

Mais une forme de protectionnisme très différente, beaucoup plus puissante dans un mode de mobilité des entreprises, pourrait bien prendre le relai : la concurrence fiscale. Le projet américain de réforme de fiscalité sur les entreprises devrait profondément bouleverser les équilibres de l’économie mondiale s’il était mis en place. Il protégerait les emplois américains au prix d’une forte dégradation de la situation chez les concurrents des Etats-Unis, au premier rang desquels l’Europe.

Les règles multilatérales du commerce pourront-elles résister à une poussée protectionniste de grande ampleur? Le principe de préférence nationale va-t-il se généraliser ? Quel serait l’impact des mesures protectionnistes sur les chaines de production mondiales ? Quelles formes nouvelles pourraient prendre le protectionnisme?