L’investissement sur le long terme et le cours de l’histoire

L’investissement est-il un frein ou un accélérateur de l’histoire ? Posée de cette façon, la question est presque trop facile. Les choix que nous ferons ne déterminent pas seulement la rapidité avec laquelle nous nous enfonçons dans une histoire pré-écrite. Ils peuvent déterminer la direction que prendra l’avenir.

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Oser l’avenir. L’investissement peut-il accélérer l’histoire ? Pour Mario Monti, l’ancien président du conseil italien, il n’y a aucun doute. Depuis les années 80, explique-t-il, nous avons eu de plus en plus d’investissement en Europe et ce n’était pas seulement bon pour le moral des entrepreneurs, ces investissements étaient autant de marqueurs de confiance qui créaient un sentiment de cohésion dans un espace mondialisé turbulent. Aujourd’hui, nous avons besoin de réinjecter des marqueurs de confiance dans l’Europe, en particulier depuis les dernières élections européennes qui ont traduit la méfiance des Européens vis-à-vis des structures super-étatiques.
Sortir des sentiers battus. « Nous avons besoin d’investissement, certes, explique Kenneth Rogoff, économiste en chef du FMI de 2001 à 2003, mais nous avons besoin d’investissements différents. Comme le disent les Américains : Nous trouvons toujours la bonne solution, une fois que nous avons essayé toutes les mauvaises. » L’expression fait rire dans la salle, les pays qui ont eu à souffrir des « mauvaises solutions » expérimentées ne doivent pas trouver cette boutade si amusante que cela. Montek Singh Ahluwalia, ancien directeur adjoint de la Commission indienne de planification, insiste notamment sur le fait que le schéma de développement économique a été dominé par les pays du nord. Or, la situation des pays de l’OCDE se dégrade et l’émergence des BRICS est réelle. « Ce dont nous avons besoin désormais, explique-t-il, c’est une gouvernance mondiale chargée de régulation les flux d’investissement. »

La théorie des états relatifs. Il existe une plaisanterie fameuse, chez les physiciens en mécanique quantique everettienne, sur la possibilité des « mondes multiples ». L’histoire, en quelque sorte, de Laurent Fabius et Kenneth Rogoff  qui se croisent aux 14e Rencontres Economiques d’Aix-en-Provence. Kenneth Rogoff dit : « Rendez-vous compte de cette crise économique dans laquelle nous nous sommes embourbés ? », Laurent Fabius répond : « Oh, ne vous en faites pas. Il y a une infinité de monde dans lesquels Lehman Brother n’a même jamais existé. ». Retour à la réalité . Le ministre des affaires étrangères a en effet insisté sur l’idée que l’investissement n’était pas seulement la possibilité d’accélérer l’histoire. Le choix des investissements que nous ferons déterminera la direction qu’elle prendra. Nous avons face à nous un nombre infini de possibilités et de futurs envisageables. Notre responsabilité est de choisir la direction la plus sûre, en fonction des informations dont nous disposons. Choisir une direction, et donc faire un investissement.

Faire le choix du durable Une statue du commandeur se dresse devant nous : c’est le dérèglement climatique. Pour Laurent Fabius, nous avons besoin d’investissements massifs et pertinents. Les pouvoirs publics doivent mettre en place des infrastructures claires pour la préservation de l’environnement. L’empreinte carbone doit notamment devenir un critère essentiel de notation des entreprises. « L’avenir est fait de risques et de chances, si nous choisissons bien nos investissements, nous pouvons limiter les risques et saisir notre chance » conclue-t-il.

Lydia Belmekki