Climat et économie, entre volonté et réalité.

Hausse des températures, multiplication des phénomènes climatiques violents, raréfaction des ressources naturelles… Le changement de climat est devenu est une réalité pour tous, et ses impacts sur l’économie font aujourd’hui l’objet de nombreuses attentions.

Directrice des opérations de la Banque Mondiale

Directrice des opérations de la Banque Mondiale

 

Une considération ancienne. L’intérêt de la sphère économique pour le climat et l’environnement n’est pas une considération récente. Parmi les précurseurs dans ce domaine, l’auteur classique Ricardo fut l’un des premiers à tirer à la sonnette d’alarme en faisant entrer les considérations environnementales dans le champ économique. Un des problèmes majeurs des ressources naturelles réside dans leur définition. Pendant longtemps les indicateurs de valeur (coût de production) étaient inexistants, les acteurs ont ainsi considéré que leur prix était nul. Mais aujourd’hui les impacts sont bien réels, « parmi les 14 années les plus chaudes du siècle, 13 se sont produites depuis les années 2000 », explique Michel Jarraud, secrétaire général de l’Organisation Météorologique Mondiale. Selon lui, ce phénomène risque d’évoluer. « La fréquence et la violence des manifestations climatiques va augmenter. Il est donc urgent de renforcer la coopération entre ces disciplines qui d’ordinaire ne travaillent pas ensemble, comme l’économie et le climat par exemple », préconise Michel Jarraud.

Changement climatique, pessimisme ou optimisme ? Savoir gérer et réduire les émissions de gaz à effets de serre est un vrai problème. Mais pour Richard Sandor, il existe un autre souci tout aussi dangereux. « La pénurie d’eau sera bien plus grave, il faut aujourd’hui trop d’eau pour produire des céréales ou de la viande, cela n’est plus possible », s’inquiète le directeur général de Environmental Fiancial Products. Le débat qui entoure cette problématique doit muter. « Pour impliquer et sensibiliser le plus grand nombre, la question du réchauffement climatique doit migrer de la sphère de la peur vers quelque chose de plus positif », expose Véra Songwé, directrice des opérations de la Banque Mondiale. Ce nouveau secteur économique semblerait être un formidable vecteur de croissance et de création d’emplois. Pour Jean-Louis Chaussade, directeur général de Suez Environnement, qui est tout aussi optimiste : « il faut certes consommer moins, mais surtout mieux, c’est le monde du Smart ! ». Les déchets de certaines entreprises se révèlent être des matières premières pour d’autres, c’est le cas des laitiers de haut fourneau. Ce rejet de l’industrie lourde est en effet utilisé dans la fabrication de  béton, ce qui en fait sur le plan économique et environnemental un produit tout à fait intéressant. Et les exemples de ce genre de situation sont légions.

Investir dans le climat. « Investir dans le climat c’est possible ! », confie Michel Jarraud. La difficulté réside aujourd’hui dans l’absence d’information. En économie traditionnelle, pour savoir si un investissement est rentable, on regarde vers le passé. Or en matière de climat ce n’est pas suffisant. Le retour sur investissement est très tardif et incertain, c’est pourquoi il est compliqué d’attirer les investisseurs. Malgré tout ce marché financier est porteur de création de richesses. « En voulant contenir les gaz à effet de serre et les transformer en énergie propre, il va falloir créer des emplois », expose Véra Songwé. À la lumière de ces informations, la problématique du changement climatique semble être une vraie urgence économique qui nécessite un changement de comportement de la part des acteurs économiques et des individus. Pour Tatsio Masuda, profeseur à Nagoya University, « il ne faut pas pleurer sur ce bouleversement, rêvons et agissons aujourd’hui pour demain ».

Norhène Ouerfelli